Au sein de tout pays démocratique, le droit de manifester est considéré comme un moyen d’expression populaire à travers lequel les dirigés exercent une sorte de pression à l’égard du pouvoir politique. Cette forme d'expression prouve en quelque sorte leur ras-le-bol, leurs désaccords, leurs frustrations et leurs principales revendications vis-à-vis des gouvernants.
Tout en reconnaissant que manifester est un droit fondamental consacré par les articles 18 et 19 de la déclaration universelle des droits de l’homme adoptée par l’assemblée générale des nations unies dans sa résolution 217 A (III) en date du 10 Décembre 1948 et l'article 31 de la constitution haïtienne du 29 mars 1987, il faut aussi admettre qu’il y a des limites à ne pas franchir pour être considéré comme manifestant et rester dans le cadre de la loi.
Oui, exprimer publiquement son mécontentement face à la mauvaise gestion des dirigeants c’est bon, c’est normal. Mais, piller les entreprises publiques ou privées prétextant qu’on est manifestant-mécontent, c’est mauvais, c’est illégal. Et, on n’a même pas un brin de sériosité, si on s’attend à ce que cela soit impunissable.
De fait, la manifestion réalisée à Ouanaminthe ce vendredi 16 Septembre 2022 perd toute sa valeur vu la façon dont cela s’est terminé. On dirait que sa finalité était purement et simplement le pillage des institutions publiques et privées de la commune. Car, la Mairie de Ouanaminthe, le bureau de l’ONA, l’école nationale des filles, le collège Mère du Bel Amour, le Service Jésuite aux Migrants/Solidarite Fwontalye (SJM-Haïti) sont entre autres institutions victimes de cette première manif.
Si certaines institutions suscitées ont été saccagées en partie, le SJM-Haïti présent à Ouanaminthe depuis le 19 juin 1999, a été totalement pillé, vilipendé et vandalisé malgré ses 23 ans d’investissement dans sa mission qui est d’accompagner, servir et de défendre les droits et la dignité des migrant-e-s, des personnes déplacées et des rapatrié-e-s victimes d’agressions, d’abus et de violences physiques, sexuels, moraux, etc.
Suite aux actes de vandalisme et de pillage perpétrés hier par des prétendus manifestants, il serait bon de voir le bilan dressé par les organisateurs. D’abord, selon des témoignages recueillis par le journal en ligne Liberté Infos, le pillage de certaines institutions de la ville a été bien planifié par les protagonistes. On déplore aussi le fait que des jeunes leaders politiques et d’opinions ont boosté des messages violents ayant rapport avec le déchoucage et le pillage.
Contrairement aux leaders politiques qui bénéficient de la faiblesse ou l’absence des lois haïtiennes en matière de l’utilisation des réseaux sociaux, les journalistes devraient se comporter en de véritables professionnels dans ces circonstances si spéciales. L’article sept (7) du code de déontologie des médias et des journalistes d’Haïti stipule clairement que « les médias et les journalistes doivent éviter le langage de la haine et de l’affrontement. Ils s’abstiennent de publier des scènes de violences, des images macabres et obscènes à des fins sensationnelles. Ils refusent de relayer les réactions de lecteurs, d’auditeurs, de téléspectateurs ou d’internautes qui nourrissent la haine, les discriminations ou les préjugés à l’égard des personnes ou de groupes. »
De ce fait, aucun journaliste digne de ce nom ne devrait promouvoir de tels actes. Et, passer de manifestant à pilleur est, selon l'avis de plus d'un, une transition criminelle. Selon un vieil adage « nul n’est censé ignorer la loi. » Donc, il revient aux autorités compétentes de bien faire leur boulot dans ce cas. D’aucuns pensent que la cité de Davilmar Théodore n’est pas prête d’accepter de tels comportements. Puisque ces actes malhonnêtes ne font aucunement partie de notre capital historique et culturel.
Fort de tout ce qui précède, la justice doit chercher et punir ces individus malintentionnés, car « nul n’est au-dessus de la loi. »
Auteur : Philomé Mathieu
Juriste, journaliste
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